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De quoi le boum du podcast est-il le nom ?

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On nous promettait un web qui ne serait que vidéo, un Youtube roi… En réaction à la sursaturation de la toile par des influenceuses et influenceurs mode, beauté, gaming ou tricot, le public se tourne chaque jour un peu plus vers le son des podcasts, nouvelles sirènes médiatiques. Mais que signifie profondément l’engouement pour cet objet sonore protéiforme ? Lame de fond médiatique ou phénomène de mode ? Décryptage avec les acteurs de l’Ouest.

De Ouest France à 20 Minutes en passant par France Inter, le podcast est devenu un support privilégié par les médias, avec une offre désormais pléthorique. Si les radios ont été naturellement les premières à investir ce support sonore – notamment pour donner accès en réécoute à leurs émissions – de nombreux acteurs, y compris les marques, se positionnent aujourd’hui avec de nouveaux programmes « natifs ».

Le Mur des Podcasts de Ouest France

Preuve de cet intérêt grandissant, le rachat l’été dernier de Saooti, éditeur de la première plateforme marque blanche « tout en un » radio & podcast-as-a-service, basé à Lannion, par le groupe SIPA Ouest France. Aujourd’hui, Saooti dispose d’un important portefeuille de radios internes (Groupe Orange, Groupe Crédit Agricole, Groupama, …), ainsi que de radios publiques, affinitaires ou métier, comme Radio France Alzheimer, Radio Médecine Douce… La collaboration entre Saooti et le Groupe Sipa Ouest-France avait débuté en 2018 avec le lancement du « mur des podcasts », plateforme dédiée à la production, au stockage, au partage, à la distribution et à la monétisation des podcasts conçus par la rédaction de Ouest-France et des radios du Groupe (Hit West, Radio Cristal, Océane FM). En investissant ainsi, le premier quotidien régional donnait le ton. Son concurrent historique, le Télégramme, possède lui aussi une page dédiée aux podcasts qui lui permet d’utiliser des contenus jusqu’alors peu ou pas exploités : « les journalistes voile du Télégramme ramènent souvent de sacrées histoires de leurs interviews avec les skippers. Un peu frustrant : tout ne peut pas rentrer dans notre bon vieux journal. Pour ne pas perdre à la mer ces formidables aventures, Le Télégramme lance sa série de podcasts, « Paroles de marins ».

Monétisation

La presse régionale a trouvé dans le podcast un bon moyen pour enrichir ses contenus mais reste l’épineuse question du coût et de la rentabilité du produit : « Nous sommes vraiment dans une période d’expérimentation, explique Estelle Prusker, responsable des études Médias à Audencia Sciencescom et par ailleurs animatrice d’une table-ronde consacrée au phénomène Podcast lors du dernier web2day à Nantes. Un enrichissement de l’offre qui mise sur le fait que l’audience globale augmente, mais il n’y a pas encore d’outil de mesure fiable pour les podcasts. Ce qui pose le problème de la monétisation de ce support. » Une difficulté qui pourrait être surmontée par l’annonce en novembre dernier de Médiamétrie : le lancement d’une mesure d’audience du replay Radio (contenus écoutés après leur passage à l’antenne) et des podcasts natifs (contenus audio originaux imaginés pour le web). Les indicateurs mesurés seront le nombre d’auditeurs, le volume et les heures d’écoute ainsi que le profil des auditeurs. Un « audimat » du podcast devrait ainsi mettre tout le monde d’accord et montrer l’impact réel de ces formats, très peu monétisés aujourd’hui. Seules les têtes d’affiche des grands studios de production parisiens comme Binge Audio, Nouvelles Ecoutes ou Louie attirent les annonceurs : une des plus célèbres comme « Les couilles sur la table » de Victoire Tuaillon compte plusieurs centaines de milliers d’écoutes par mois et intègre un message publicitaire au début du podcast, équivalent du pré-roll d’une vidéo Youtube.

Marques

Au-delà des investissements publicitaires se pose la question cruciale de la création – ou pas – d’un podcast de marque. Les annonceurs vont-ils sauter le pas ? Pas si simple selon Clément le Pleux, responsable de la stratégie de contenus chez Intuiti (Agence digitale – Nantes) : « On sent un véritable intérêt de la part de nos clients mais le choix du podcast reste encore assez limité malgré les avantages du format, en termes de storytelling, de référencement et de coût de production, bien moindre qu’une vidéo ». Si le format podcast est désormais très présent dans les préconisations des agences, la frilosité est encore là : « Pour certains, il est encore trop tôt, d’autres ne comprennent pas l’intérêt… il faut dire que le marché est encore embryonnaire par rapport aux Etats-Unis. C’est encore loin d’être un réflexe. » Selon lui, le podcast reste un pari : « les marques peuvent miser sur une démocratisation du format, qui reste encore essentiellement consommé par des CSP + urbaines… Mais installer aujourd’hui un podcast peut permettre à une marque de prendre une place prépondérante. C’est un format très intéressant pour faire de la pédagogie ou encore pour créer de l’intimité avec une communauté. Il existe un fort enjeu affinitaire. » La jeune agence Ouest digital, créée en 2017, a quant à elle lancé son propre podcast sur la thématique du social media : « L’idée de départ de la création d’un podcast pour l’agence, c’était d’évangéliser prospects et clients sur nos savoir-faire, car il est parfois complexe de comprendre ce qu’est le social media management, explique Bryan Coder, responsable de l’agence. Le podcast a une dimension très pédagogique, complémentaire à notre blog». Autre ambition derrière cette innovation : se tester sur un nouveau format. « On devait aussi s’intéresser au podcast parce que nos clients vont certainement nous demander d’en produire pour leurs réseaux sociaux. Comment produit-on du son ? Qu’est ce que l’on raconte ? On a déjà un retour d’expérience ».

Indépendants

D’autres créateurs profitent du succès de leur réalisation pour proposer leur savoir-faire aux entreprises : l’art du storytelling, de l’interview… autant d’expertises recherchées aujourd’hui par les marques. Certains se sont lancés en tant que producteurs indépendants comme Dimitri Régnier ou Simon Lefebvre, qui a mis son activité de développement web entre parenthèses pour se consacrer à la production du podcast « Contrevent », qui propose des interviews de personnalités « inspirantes ». (entrepreneurs, artistes…) « Cela faisait un moment que j’y pensais.Beaucoup de podcats le font déjà mais cela reste un phénomène très parisien. Moi, je voulais mettre en valeur des personnalités nantaises, faire du local. Avec le succès du podcast, j’ai noué beaucoup de contacts et notamment avec des agences, qui font appel à moi pour des projets clients, alors que je m’étais lancé sans penser au business ». Et Simon Lefebvre est persuadé de l’intérêt du support : « Les marques doivent se positionner aujourd’hui car elles ont encore beaucoup de liberté, un peu comme dans les balbutiements d’instagram. Il existe une opportunité incroyable aujourd’hui pour peu que les entreprises soient les premières sur leur sujet. En 2020 ou 2021, il y aura sans doute trop d’offres pour émerger. »

Spécialistes

Des structures spécialisées se lancent également sur le marché presque vierge de la production de contenus sonores. C’est le cas d’Alvéole à Nantes, créé par le duo Boris Lemasson et Pierre-Yves Allain, deux anciens de radio (journaliste et technicien), qui propose de « se faire entendre autrement ». « On s’est dit qu’il y avait une place à prendre sur ce marché du podcast . Un format révélateur d’un mode de consommation des médias, lié au streaming et à la mobilité, et qui permet l’immersion dans un univers sonore très intimiste et moins envahissant qu’une vidéo. Notre ambition, c’est de réaliser un produit éditorialisé avec une très bonne qualité sonore. Pas seulement du podcast mais aussi des parcours sonores ». Alvéole a d’ailleurs équipé fin 2019 l’Hôtel nantais Radisson Blu de « Scabellons », objets qui forment un parcours unique avec un système d’écoute intégré et trois formats créatifs : L’histoire du lieu, sa transformation et sa vie actuelle. L’agence a aussi invest l’univers du BtoB en réalisant des séries pour Lacroix Electronics ou Informatique Banque Populaire. « Les contenus sonores sont un vrai enjeu pour les marques qui veulent se différencier dans leur prise de parole. Et le champ des possibles est très vaste ».

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